Dirk BOGARDE
 Acteur britannique
Dans la première partie de sa carrière, Dirk Bogarde, jeune premier élégant et charmant, déclenche rapidement une ferveur très forte auprès des demoiselles. Mais l’image que les producteurs de la Rank Organisation créent de lui n’amuse pas longtemps le bonhomme. Mettant brusquement en cause sa carrière artistique autant que sa tranquillité, Dirk Bogarde se tourne vers des rôles plus proches de sa personnalité, dominée par une homosexualité alors qualifiable de criminelle, puisqu’interdite par la loi. Enfin réconcilié avec sa conscience, cet acteur de génie va devenir en quelques années l’un des comédiens britanniques les plus reconnus et appréciés de sa génération.
Vedette de la Rank
Dirk Bogarde, de son vrai nom Derek Van den Bogaerde, naît à Hampstead, quartier chic de Londres le 28 mars 1921. Son père, d’origine hollandaise, Uluric van den Bogaerde, dirige le service photographique du Times et sa mère Perry Barr est une comédienne écossaise. Il grandit avec sa sœur Elisabeth et son frère Gareth à Glasgow où il fait ses études à l'University College School. Le jeune Dirk commence une carrière de dessinateur et de décorateur. En 1939, sous le nom de Derek Bogaerde, il fait ses débuts de comédien, dans un théâtre de la banlieue londonienne et fait sa première apparition au cinéma dans Come on George avec le comique populaire George Formby. Mais ce début de carrière est interrompu par la guerre. Il est affecté à au service de renseignement du général Montgomery qu'il suit pendant le débarquement et la libération du camp de Bergen-Belsen, tout en dessinant les batailles. Deux de ses œuvres seront conservées au Musée de la guerre britannique. De retour à Londres, il adopte le nom de Dirk Bogarde. Il joue avec succès la pièce Power without glory avec Kenneth More et après une apparition non créditée dans Esther Waters, il signe, en 1947, un contrat avec la Rank. La Lampe bleue de Basil Dearden, où il interprète un voyou tueur de flic et Rapt de Charles Crichton, en jeune meurtrier accident donnent de l’ampleur à sa carrière naissante. Bogarde déploie une belle énergie dans des films noirs comme La Femme en question d'Anthony Asquith, Si Paris l'avait su avec Jean Simmons ou Aventures à Berlin où incarcéré à tort, il découvre l'amour de Mai Zetterling mais aussi des films de guerre en pilote de bombardier dans Sa dernière mission, des films d'aventure comme Simba ou de fidèles adaptations littéraires comme Sous la Terreur d'après Charles Dickens. Son énorme succès dans Toubib or not toubib de Ralph Thomas, une histoire d’étudiants en médecine, montre à la Rank qu'employé dans des rôles de jeunes premiers troubles, il pouvait aussi jouer dans des comédies légères. Bogarde reprend son rôle à quatre reprises dont Rendez-vous à Rio avec la débutante Brigitte Bardot. En 1954, il rencontre pour la première fois Joseph Losey, récemment blacklisté, pour La bête s’éveille. Il donne la réplique à Olivia de Havilland dans l'adaptation de George Bernard Shaw La Nuit est mon ennemi d'Anthony Asquith. Il fait escale à Hollywood en 1959 pour incarner le compositeur Franz Liszt dans Le Bal des Adieux auprès de Capucine.
Bogarde et Losey
Au sommet de la gloire, Dirk Bogarde n'est pas satisfait de la tournure de sa carrière. Détestant le vedettariat, il cherche des sujets plus personnels, défiant la moralité ambiante et proclamant ouvertement son homosualité. Son souhait de reconnaissance par ses pairs se concrétise par La Victime où professeur, il est confronté au suicide de son élève et amant et surtout The Servant de Joseph Losey sur un scénario d'Harold Pinter où il joue avec génie de son regard ambigu, de son sourire énigmatique et sa distinction machiavélique pour précipiter son maître à la déchéance. Dirk Bogarde démontre l'immensité de son talent et reçoit le prix du meilleur acteur de la British Film Academy. Si Pour l'Exemple de Losey sur les exécutions sommaires de soldats de la première guerre mondiale ne remporte le succès qu'il mérite, Bogarde remporte un deuxième BAFTA pour son rôle de scénariste manipulateur dans Darling de John Schlesinger. Le comédien trouve un nouveau public, international et plus intellectuel. Dirk Bogarde tourne quatre films en quatre ans avec Joseph Losey. Il se pastiche avec élégance auprès de Monica Vitti dans la satire du film d'espionnage, Modesty Blaise et joue un professeur d'université tourmenté dans Accident.
Un acteur de génie
Son raffinement extrême et l'intensité de son jeu font de Dirk Bogarde un gage de qualité pour toutes ses créations. Il incarne avec génie des personnages troubles comme le banquier cynique et pervers de Justine ou l’industriel sympathisant nazi dans Les Damnés de Visconti. Il est tout aussi convaincant dans le rôle du père de famille nombreuse dans Chaque soir à neuf heures de Jack Clayton, du professeur d’Oxford dépassé par les nouvelles technologies dans Les filles du code secret de David Green, de l’avocat idéaliste dans L’homme de Kiev de John Frankenheimer, du vieil homme obsédé par la beauté de la jeunesse dans Mort à Venise de Luchino Visconti d'après Thomas Mann. Mais pour contredire les milieux intellectuels, il ne rechigne pas à s'allier à des superproductions comme Oh, que la guerre est jolie et Un pont trop loin de Richard Attenborough ou Le Serpent d'Henri Verneuil.
Avec de grands auteurs internationaux
En pleine possession de son talent, Dirk Bogarde ne tourne qu'une poignée de film à partir de 1972 mais son aura internationale lui permet de tourner avec Alain Resnais pour Providence aux côtés de John Gielgud et Ellen Burstyn, Liliana Cavani dans Portier de nuit en ancien tortionnaire nazi de Charlotte Rampling, Rainer Werner Fassbinder dans Despair. Le résultat de ce dernier film met d'acteur très en colère. "C'était la meilleur performance que j'ai jamais faite dans ma vie", raconte-t-il dans ses mémoires, "Fassbinder a vraiment détri le film à grand coup de ciseaux". Le comédien se retire dans le Sud-Est de la France, se consacre à l'écriture en publiant en 1977 sept recueils de mémoires, A postillon struck by lightning, parus en France sous le titre Une Enfance Rêvée et six romans. Dirk Bogarde regagne son pays natal en 1986. Il revient dans le téléfilm The Patricia Neal story où il incarne le romancier Roald Dahl, avec Glenda Jackson dans le rôle-titre, puis Bertrand Tavernier lui écrit un dernier rôle sur mesure, celui du père mourant de Jane Birkin dans Daddy Nostalgie en 1989. Il subit un AVC en novembre 1987. Une opération d'angloplastie le laisse paralysé d'un côté de son corps et l'oblige à circuler dans un fauteuil roulant. Dirk Bogarde meurt d’une crise cardiaque le 8 mai 1999 dans son domicile de Londres. Ses cendres sont dispersées dans son domaine de Grasse dans le sud de la France.


FILMOGRAPHIE :

Avec Joseph Losey
1939 : Come On George! d’Anthony Kimmins
1947 : Dancing with Crime de John Paddy Carstairs
1948 : Once a Jolly Swagman de Jack Lee
1948 : Esther Waters, de Ian Dalrymple et Peter Pround
1949 : Quartet (Quartet) d’Harold French, Ken Annakin, Arthur Crabtree & Ralph Smart
1949 : Dear Mr. Prohack de Thornton Freeland
1949 : Boys in Brown de Montgomery Tully
1950 : La Lampe bleue (The Blue Lamp) de Basil Dearden
1950 : Si Paris l'avait su (So Long at the Fair) d’Antony Darnborough et Terence Fisher
1950 : La Femme en question (The Woman in question) d’Anthony Asquith
1950 : Blackmailed de Marc Allégret
1952 : Rapt (Hunted) de Charles Crichton
1952 : Fromage à gogo (Penny Princess) de Val Guest
1952 : Un si noble tueur (The Gentle Gunman) de Basil Dearden
1953 : Aventures à Berlin (Desperate Moment) de Compton Bennett
1953 : Sa dernière mission (Appointment in London) de Philip Leacock
1954 : Commando à Rhodes (They Who Dare) de Lewis Milestone
1954 : Toubib or not Toubib (Doctor in the House) de Ralph Thomas
1954 : La bête s'éveille (The Sleeping Tiger) de Joseph Losey
1954 : The Sea Shall Not Have Them de Lewis Gilbert
1954 : Pour le meilleur et pour le pire (For Better, for Worse), de Jack Lee Thompson
1955 : Simba de Brian Desmond Hurst
1955 : Rendez-vous à Rio (Doctor at Sea) de Ralph Thomas
1956 : Le Jardinier espagnol (The Spanish Gardener) de Philip Leacock
1957 : L'assassin s'est trompé (Cast a Dark Shadow) de Lewis Gilbert
1957 : Intelligence Service (I’ll Met by Moonlight) de Michael Powell et Emeric Pressburger
1957 : Toubib en liberté (Doctor at Large) de Ralph Thomas
1957 : La Vallée de l'or noir (Campbell’s Kingdom) de Ralph Thomas
1958 : Sous la terreur (A Tale of Two Cities) de Ralph Thomas
1958 : Le vent ne sait pas lire (The Wind Cannot Read) de Ralph Thomas
1958 : Le Dilemme du docteur (The Doctor's Dilemma) d’Anthony Asquith
1959 : La nuit est mon ennemie (Libel) d’Anthony Asquith
1960 : Le Bal des adieux (Song Without End), de Charles Vidor
1960 : L'Ange pourpre (The Angel Wore Red) de Nunnally Johnson
1961 : La Victime (Victim) de Basil Dearden
1961 : Le Cavalier noir (The Singer Not the Song) de Roy Ward Baker
1962 : Les Mutinés du Téméraire (H.M.S. Defiant) de Lewis Gilbert
1962 : Mot de passe courage (The Password Is Courage) d’Andrew L. Stone
1963 : Au bord du gouffre (The Mind Benders) de Basil Dearden
1963 : L'Ombre du passé (I Could Go On Singing) de Ronald Neame
1963 : The Servant (The Servant) de Joseph Losey
1963 : Docteur en détresse (Doctor in Distress) de Ralph Thomas
1964 : X3, agent secret (Hot Enough for June) de Ralph Thomas
1964 : Dernière Mission à Nicosie (The High Bright Sun) de Ralph Thomas
1964 : Pour l'exemple (King and Country) de Joseph Losey
1965 : Darling (Darling) de John Schlesinger
1966 : Modesty Blaise (Modesty Blaise) de Joseph Losey
1966 : Blithe Spirit de George Schaefer (tv)
1967 : Accident (Accident) de Joseph Losey
1967 : Chaque soir à neuf heures (Our Mother's House) de Jack Clayton
1968 : Les Filles du code secret (Sebastian) de David Greene
1968 : L'Homme de Kiev (The Fixer) de John Frankenheimer
1969 : Ah Dieu ! que la guerre est jolie (Oh! What a Lovely War) de Richard Attenborough
1969 : Justine (Justine) de George Cukor
1969 : Les Damnés (La caduta degli dei) de Luchino Visconti
1970 : Upon This Rock d’Harry Rasky (tv)
1971 : Mort à Venise (Morte a Venezia) de Luchino Visconti
1973 : Le Serpent d’Henri Verneuil
1974 : Portier de nuit (Il portiere di notte) de Liliana Cavani
1975 : La Trahison (Permission to Kill) de Cyril Frankel
1977 : Providence d’Alain Resnais
1977 : Un Pont trop loin (A Bridge Too Far) de Richard Attenborough
1978 : Despair (Despair, eine Reise ins Licht) de Rainer Werner Fassbinder
1981 : Acte d’Amour (The Patricia Neal Story) d’Anthony Harvey & Anthony Page (tv)
1986 : Peut-on emprunter votre mari ? (May We Borrow Your Husband?) de Bob Mahoney (tv)
1987 : Screen Two, « The Vision » de Norman Stone (tv)
1990 : Daddy nostalgie (Daddy Nostalgia) de Bertrand Tavernier


Filmographie de Dirk BOGARDE
 
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