Albert Préjean naît le 27 octobre 1894 à Pantin et grandit à Aubervilliers où ses parents tiennent un bistro. Alors qu'il accomplit son service militaire dans les dragons, la guerre de 1914-1918 est déclarée. L'aviation militaire n'existant pas encore, des formations, équipées d'aéronefs, demandent des volontaires. Le futur acteur s'illustre dans cette nouvelle façon de faire la guerre. Blessé deux fois, il est décoré et retourne à la vie civile. Albert fait un peu tous les métiers pour subsister. Très sportif et notamment excellent escrimeur, il est engagé en 1921 pour ferrailler comme figurant dans les séries Les Trois mousquetaires adaptées à l'écran par Henri Diamant-Berger. Il tourne avec ce cinéaste plusieurs films en trois ans, parmi lesquels Gonzague avec Maurice Chevalier et Florelle. Il s'essaie aussi à la réalisation en 1929 avec L'aventure de Luna Park aux côtés de Danièle Parola.
Le gouailleur chantant
Mais c'est l'époque du music-hall et des cabarets. Albert Préjean, qui ne chante pas plus mal qu'un autre, se lance sur scène et y réussit au mieux, servi par des musiques de musette, désormais inoubliables. Alors qu'il approche de la quarantaine, c'est René Clair qui lui apporte vraiment la notoriété, après l'avoir dirigé au temps du muet dans Paris qui dort, Le Voyage imaginaire et Un Chapeau de paille d'Italie, et au début du parlant dans Sous les toits de Paris. Dans cette première production sonore française, les dialogues sont limités mais Albert chante vraiment. Il est amoureux de l'actrice roumaine Pola Illéry. Cette œuvre, encore maladroite dans sa conception, initialise, pour le monde entier, le réalisme romantique à la française que va si bien illustrer Jean Gabin.
Les titi populaire
Albert Préjean qui parle correctement l'allemand travaille alors beaucoup dans les studios berlinois de la UFA. Il commence par L'Opéra de quat'sous, aux côtés de Florelle et Annabella, écrit par Bertolt Brecht sur une musique de Kurt Weill. L'acteur fait plus d'une quarantaine de films en dix ans avec tous les cinéastes européens renommés de l'époque, comme Henri Decoin (Les Bleus du Ciel), Jacques Tourneur (Toto) Julien Duvivier (Le Paquebot Tenacity), Edmond T. Gréville (Mademoiselle Tam-Tam), l'Italien Carmine Gallone (Le Chant du Marin), l'allemand Robert Siodmak (Mollenard) ou Marcel Carné débutant (Jenny). Ce charmeur irrésistible connaît de nombreuses aventures avec ses partenaires comme Annabella (Soir de rafle), Brigitte Helm (Voyage de noces), Ginette Leclerc (Métropolitain) ou Dolly Mollinger (Place de la Concorde). Il tourne cinq films avec Danielle Darrieux encore gamine dont La crise est finie de Robert Siodmak, Quelle drôle de gosse ! et Caprices de Léo Joannon. D'abord utilisé comme acteur chansonnier, à l'image d'Henri Garat, l'acteur se voit confier des rôles plus dramatiques dans L'Alibi, Mollenard ou La Piste du Sud.
Le bonheur des dames
En 1942 il fait partie du voyage promotionnel à Berlin des vedettes françaises, manifestation organisée par la propagande allemande. Ce qui lui vaudra quelques semaines d'incarcération à la libération. Pendant l'occupation en particulier, il obtient son plus grand succès dans Au Bonheur des Dames d'André Cayatte, un titre qui lui allait si bien et succède à Harry Baur, dans le rôle du célèbre inspecteur Maigret mais ses prestations dans Picpus, Cécile et morte et Les Caves du Majestic sont jugés par Georges Simenon comme une erreur de casting. En 1946, il se remarie avec la comédienne Lysiane Rey qui lui avait donné un fils Patrick, futur comédien en 1944. Rapidement séparé, le couple décide d'occuper le même appartement pour ne pas perturber le petit Patrick. À partir de cette période, il ne se produit plus qu'épisodiquement et dans des rôles secondaires comme dans Les amants du Tage d'Henri Verneuil avec Amalia Rodriguez ou Un missionnaire de Maurice Cloche avec Darling Légitimus, la grand'mère de Pascal. Il anime aussi en monsieur Loyal les séances du cirque de Jean Richard. Il tourne son cent-quinzième et dernier film en 1961 Bonne chance, Charlie avec Eddie Constantine. Jeune remarié, à plus de quatre-vingts ans avec Jeanne Poché, qu'il appelle affectueusement Jany en 1977, il décède à Paris, le 1er novembre 1979.
FILMOGRAPHIE :
Avec Patrick Préjean
1921 : Les Trois Mousquetaires d'Henri Diamant-Berger
1922 : Vingt ans après d'Henri Diamant-Berger
1922 : Le Mauvais Garçon d'Henri Diamant-Berger
1922 : Gonzague d'Henri Diamant-Berger
1923 : Jim Bougne, boxeur d'Henri Diamant-Berger
1923 : Le Roi de la vitesse d'Henri Diamant-Berger
1923 : Paris qui dort de René Clair
1923 : Le Costaud des Épinettes de Raymond Bernard
1923 : Grandeur et décadence de Raymond Bernard
1924 : Le miracle des loups de Raymond Bernard
1924 : L'Homme inusable de Raymond Bernard
1924 : Le Fantôme du Moulin-Rouge de René Clair
1925 : La Justicière de Maurice Marsan et Maurice Gleize
1925 : Le Voyage imaginaire de René Clair
1925 : Amour et carburateur de Pierre Colombier
1926 : Le Bouif errant de René Hervil
1927 : Le Joueur d'échecs de Raymond Bernard
1927 : Éducation de prince d'Henri Diamant-Berger
1927 : Le Chauffeur de mademoiselle d'Henri Chomette
1928 : Un chapeau de paille d'Italie de René Clair
1928 : Les Nouveaux Messieurs de Jacques Feyder
1928 : Verdun. Visions d'Histoire de Léon Poirier
1929 : Le Requin d'Henri Chomette
1929 : Fécondité d'Henri Étiévant et Nicolas Evreïnoff
1930 : Sous les toits de Paris de René Clair
1931 : L'Opéra de quat'sous de Georg Wilhelm Pabst
1931 : Un soir de rafle de Carmine Gallone
1931 : Le Joker d'Erich Waschneck
1931 : Le Chant du marin de Carmine Gallone
1932 : L'Amoureuse Aventure de Wilhelm Thiele
1932 : Rivaux de la piste de Serge de Poligny
1932 : Voyage de noces d'Erich Schmidt et Germain Fried
1932 : Un fils d'Amérique de Carmine Gallone
1933 : Théodore et Cie de Pierre Colombier
1933 : Toto de Jacques Tourneur
1933 : Les Bleus du ciel d'Henri Decoin
1933 : Caprice de princesse de Karl Hartl et Henri-Georges Clouzot
1933 : Volga en flammes de Victor Tourjansky
1934 : La crise est finie de Robert Siodmak
1934 : Le Paquebot Tenacity de Julien Duvivier
1934 : L'Or dans la rue de Curtis Bernhardt
1934 : Le Secret d'une nuit de Félix Gandéra
1935 : Dédé de René Guissart
1935 : Le Contrôleur des wagons-lits de Richard Eichberg
1935 : Moïse et Salomon parfumeurs d'André Hugon
1935 : Lune de miel de Pierre-Jean Ducis
1935 : Princesse Tam Tam de Edmond T. Gréville
1935 : Paris Camargue de Jack Forrester
1935 : Quelle drôle de gosse de Léo Joannon
1935 : L'Auberge du Petit-Dragon de Jean de Limur
1936 : Jenny de Marcel Carné
1937 : À Venise, une nuit de Christian-Jaque
1937 : Neuf de trèfle de Lucien Mayrargue
1937 : L'Alibi de Pierre Chenal
1937 : Mollenard de Robert Siodmak
1937 : La Fessée de Pierre Caron
1938 : La Rue sans joie d'André Hugon
1938 : La Piste du sud de Pierre Billon
1938 : L'Inconnue de Monte-Carlo d'André Berthomieu
1938 : Métropolitain de Maurice Cam
1939 : Place de la Concorde de Karel Lamac
1939 : Nord-Atlantique de Maurice Cloche
1939 : L'Or du Cristobal de Jacques Becker
1939 : Dédé la musique d'André Berthomieu
1939 : Pour le maillot jaune de Jean Stelli
1941 : Caprices de Léo Joannon
1941 : L'Étrange Suzy de Pierre-Jean Ducis
1942 : Picpus de Richard Pottier
1943 : La Vie de plaisir d'Albert Valentin
1943 : Au bonheur des dames d'André Cayatte
1944 : Cécile est morte de Maurice Tourneur
1944 : Les Caves du Majestic de Richard Pottier
1946 : L'assassin n'est pas coupable de René Delacroix
1946 : La Kermesse rouge de Paul Mesnier
1946 : Le Secret du Florida de Jacques Houssin
1946 : L'Homme de la nuit de René Jayet
1947 : L'Idole d'Alexandre Esway
1947 : La Grande Volière de Georges Péclet
1948 : Les Frères Bouquinquant de Louis Daquin
1948 : Piège à hommes de Jean Loubignac
1948 : Les anges sont parmi nous de William Magnin et E.G de Meyst
1949 : Les Nouveaux Maîtres de Paul Nivoix
1951 : Ils sont dans les vignes de Robert Vernay
1951 : Le Désir et l'amour d'Henri Decoin
1954 : Casse-cou, mademoiselle de Christian Stengel
1954 : Chéri-Bibi de Marcello Pagliero
1955 : Un missionnaire de Maurice Cloche
1956 : Le Circuit de minuit d'Yvan Govar
1956 : Adorables démons de Maurice Cloche
1957 : Paris Music Hall de Stany Cordier
1959 : Ça peut toujours servir de Georg Jacoby
1962 : Bonne chance, Charlie de Jean-Louis Richard
Filmographie d'Albert PRÉJEAN