Gina MANÈS
 Actrice française
Fille d'un fabricant de meubles du 12e arrondissement, la jeune Blanche Moulin qui deviendra pour le cinéma Gina Manès voit le jour à Paris, le 7 avril 1893. Elle épouse, à 15 ans, un employé de son père pour en divorcer aussitôt. Après un accident de chasse, l'acteur Max Dearly l'envoie en convalescence à Nice. Sous le nom de Gina Manès, elle paraît au music-hall dans les fameuses revues de Rip avant que René Navarre, le célèbre Fantômas de Feuillade, frappé par sa beauté, ne l'oriente vers les studios de cinéma en 1916 et la fait engagé sur plusieurs cinéroman. En 1919, le grand Louis Feuillade la dirige à son tour dans L'homme sans visage.
Une vamp du muet
Après un second rôle remarqué dans La dame de Monsoreau de René Le Somptier d'après Dumas, c'est Jean Epstein qui en fait une vedette en 1923 dans L'auberge rouge, d'après Balzac. Elle n'y tient pourtant que le rôle secondaire de la fille des aubergistes assassins. Le cinéaste magnifie son beau visage expressif dans son chef-d'œuvre Cour fidèle. Baptisée «la vamp aux yeux d'émeraude», elle alterne mélodrame et films de recherche avec les cinéastes français d'avant-garde comme Germaine Dulac (Âme d'artiste) ou Marcel l'Herbier (Nuit de prince), mais aussi en Suède sous la direction de Gustav Molander (Ivresse en 1928) ou en Allemagne avec William Dieterle et Carmine Gallone.
La Beauharnais pour Gance
En 1925, sur le tournage de Naples au baiser de feu, elle tombe amoureuse du jeune premier, Georges Charlia. Le couple vedette se retrouve à l'affiche l'année suivante d'un film d'Alberto Cavalcanti, Le train sans yeux. Mariage et succès vont de pair. Star incontestable à la fin du muet, Gina Manès entre dans l'histoire du cinéma grâce à Abel Gance qui ne voit qu'elle pour jouer Joséphine de Beauharnais dans son Napoléon. Son plus beau rôle sera pourtant celui de Thérèse Raquin où, dirigée par Jacques Feyder à Berlin, elle enthousiasme la critique. Malheureusement, toutes les copies de ce film auraient disparu. Gina Manès passe sans encombres le cap du parlant. Une belle garce, Sous le casque de cuir et Salto mortale de l'allemand E. A. Dupont en 1931 sont des succès. Dans La tête d'un homme de Julien Duvivier, elle affronte Harry Baur en Maigret.
Second rôle exotique
C'est le moment qu'elle choisit pour tout laisser tomber et partir au Maroc tenir un restaurant avec son mari. Lorsqu'elle réapparaît deux ans plus tard, les premiers rôles lui échappent. Vouée aux personnages secondaires, elle se fait une spécialité des prénoms exotiques comme Bianca, Marinka, Rosita, Florica, Daïnah, Lodovisca. Espionne roumaine ou allemande (La voie sans disque), girl dépravée (Divine), gitane capiteuse (Mayerling), elle nous propose encore des créations exotiques marquantes dans Mollenard de Siodmak ou La maison du Maltais de Chenal. Les tentatives pour retrouver la tête d'affiche ne sont guère couronnées de succès, même si les titres de films jouent avec son image de femme fatale (La mystérieuse Lady ou Maria de la nuit).
Reine du cirque
Dans Le diable en bouteille, elle chante : «Moi, je n'dois rien à personne». Forte de ce principe, elle se tourne vers le cirque et présente un numéro de dressage de fauves. En novembre 1942, un tigre la saisit à la tête. Victime d'une quarantaine de morsures, Gina devra renoncer à cette nouvelle carrière. Au cinéma, les années 40 ne lui réservent que de rares apparitions comme dans Les caves du Majestic face au nouveau Maigret, Albert Préjean. En 1949, séparée de Georges Charlia, elle tente à nouveau l'aventure marocaine, cette fois pour enseigner l'art dramatique mais ses projets font long feu, elle regagne la France en 1954 où la désillusion est rude. À 60 ans, elle n'est plus rien, on ne lui propose que des personnages anonymes, parfois de simples figurations. On l'aperçoit en habilleuse dans La belle Otero, en paysanne dans Le vicomte de Bragelonne, en prostituée dans Rafles sur la ville. À l'exception d'un dernier rôle face à Pierre Brasseur dans Pas de panique en 1965, le bilan de cette décennie est désolant. Toujours courageuse, Gina reprend le chemin du théâtre et s'installe à Toulouse, où elle meurt à 96 ans, le 6 septembre 1989. Belle actrice au parcours chaotique, Gina Manès continue d'avoir des admirateurs inconditionnels comme Ado Kyrou qui voit en elle «la seule actrice à avoir compris l'érotisme cinématographique, la seule grande dame du cinéma français».


FILMOGRAPHIE :

Avec Léon Mathot
1917 : Les cours de six petites françaises d'Édouard Emile Violet (cm)
1919 : L'homme sans visage de Louis Feuillade
1920 : Le secret d'Alta Rocca d'André Liabel (12 épisodes)
1920 : Tue-la-mort de René Navarre (12 épisodes)
1921 : L'homme aux trois masques d'Emile Keppens & René Navarre (12 épisodes)
1921 : Le sept de trèfle de René Navarre (12 épisodes)
1922 : La dame de Montsoreau de René Le Somptier
1923 : L'auberge rouge de Jean Epstein
1923 : Cour fidèle de Jean Epstein
1923 : La nuit rouge de Maurice de Marsan & Maurice Gleize
1923 : Le cavalierde minuit de Maurice Charmeroy, René Alinat & M. Toulet
1924 : La main qui a tué de Maurice de Marsan & Maurice Gleize
1924 : Âme d'artiste de Germaine Dulac
1925 : Naples au baiser de feu de Serge Nadejdine & Jacques Robert
1925 : Le soleil de minuit de Richard Garrick & Jean Legrand
1925 : Le train sans yeux d'Alberto Cavalcanti
1926 : Napoléon d'Abel Gance
1926 : Sables de Dimitri Kirsanoff
1927 : Celle qu'on renie (Mädchenschicksal) de Richard Löwenbein
1927 : Printemps d'amour (Love's springtime) de Léonce Perret
1927 : Pauvre gosse (Die kleine Sklavrin) de Luise Fleck & Jacob Fleck
1927 : Thérèse Raquin (Du sollst nicht ehebrechen) de Jacques Feyder
1928 : La sainte et son fou (Die Heilige und ihr narr) de William Diertele
1928 : S.O.S. (Schiff im not S.O.S.) de Carmine Gallone
1928 : Ivresse (Rausch) de Gustaf Molander
1928 : Looping the loop d'Arthur Robison
1928 : Péché (Synd) de Gustaf Molander
1929 : Quartier Latin d'Augusto Genina
1929 : Nuit de prince de Marcel L'Herbier
1929 : Un soir au Cocktail's Bar de Roger Lion
1929 : Le requin d'Henri Chomette
1930 : L'ensorcellement de Séville de Benito Perojo
1930 : Une belle garce de Marco de Gastyne
1931 : Sous le masque de cuir d'Albert de Courville
1931 : Grock de Carl Boese & Joë Hamman
1931 : Salto mortale d'Ewald André Dupont
1931 : Pax de Francisco Elías
1932 : La voix sans disque de Léon Poirier
1932 : La tête d'un homme de Julien Duvivier
1933 : L'amour qu'il faut aux femmes d'Adolf Trotz
1933 : Le diable en bouteille de Raoul Ploquin & Heinz Hilpert
1934 : Barcarolle de Gerhardt Lamprecht & Roger Le Bon
1934 : La famille Pont-Biquet de Christian-Jaque
1934 : Divine de Max Ophüls
1935 : Mayerling d'Anatole Litvak
1935 : La brigade en jupons de Jean de Limur
1935 : La mystérieuse Lady de Robert Péguy
1936 : Le mort d'E.G. de Meyst
1936 : Les loups entre eux de Léon Mathot
1936 : La tentation de Pierre Caron
1936 : Les réprouvés de Jacques Séverac
1936 : Maria de la nuit de Willy Rozier
1937 : Nostalgie de Victor Tourjansky
1937 : Gosse de riche de Maurice de Canonge
1937 : Mollenard de Robert Siodmak
1938 : La mariage de Verena / La batârde de Jacques Daroy
1938 : Le récif de corail de Maurice Gleize
1938 : Fort Dolorès de René Le Hénaff
1938 : S.O.S. Sahara de Jacques de Baroncelli
1939 : La maison du Maltais de Pierre Chenal
1939 : L'enfant dans la tourmente de René Jayet
1944 : Les caves du Majestic de Richard Pottier
1945 : Yasmina de Jean Lordier
1946 : Le bateau à soupe de Maurice Gleize
1947 : Minuit rue de l'Horloge de Jean Lordier
1947 : École foraine de Jacques Séverac (cm)
1948 : Les noces de sable d'André Zwoboda
1949 : La danseuse de Marrakech de Léon Mathot
1953 : Marchandes d'illusions de Raoul André
1953 : Crime au Concert Mayol de Pierre Méré
1954 : La belle Otero de Richard Pottier
1954 : Le vicomte de Bragelonne (Il visconte di Bragelonne) de Fernando Cerchio
1954 : Le secret de sœur Angèle de Léo Joannon
1955 : Milord l'Arsouille d'André Haguet
1955 : Le couturier de ces dames de Jean Boyer
1955 : Les carnets du Major Thompson de Preston Sturges
1956 : Paris Palace Hôtel d'Henri Verneuil
1956 : Pitié pour les vamps de Jean Josipovici
1956 : Rafles sur la ville de Pierre Chenal
1957 : La loi des rues de Ralph Habib
1957 : Un certain monsieur Jo de René Jolivet
1957 : L'or de Samory de Jean Alden Delos (inachevé)
1957 : Mimi Pinson de Robert Darène
1958 : Premier mai de Luis Saslavsky
1958 : Le joueur de Claude Autant-Lara
1959 : Le bonheur est pour demain d'Henri Bastiani
1959 : Les amants de demain de Marcel Blistène
1965 : Pas de panique de Sergio Gobbi


Filmographie de Gina MANÈS
 
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