Robert LE VIGAN
 Acteur français
De Robert Le Vigan, il reste ces mots de Renoir : «Le Vigan n'était pas seulement un grand acteur, il était l'acteur né pour vivre sur les planches. Le Vigan n'était pas un acteur, c'était un poète». Il reste la vérité d'un acteur hors pair dont on s'accorde à reconnaître l'immensité du talent. En cela la postérité en fait un petit frère de Céline, célébré comme un des plus grands écrivains français et à jamais marqué comme homme du signe infamant du racisme, de la délation et de la haine.
Robert Le Vigan naît Robert Charles Alexandre Coquillaud, le 7 janvier 1900, à Paris. Fils d'André, vétérinaire montmartrois et de Charlotte Grollet, il commence sa carrière théâtrale par le music hall et la comédie. On le voit dans Le Bonheur d'Oulmont, L'Idiot de Dostoievski, Le Misanthrope de Molière et La grande Catherine de George Bernard Shaw. Des personnages tourmentés qui seront sa marque de fabrique.
Face à Jean Gabin
C'est déjà un comédien confirmé quand il aborde le cinéma. En 1933, il rencontre Jean Gabin dans Le Tunnel de Curtis Bernhardt. Les deux acteurs vont se retrouver dans des films de légende. Julien Duvivier les dirige d'abord dans Maria Chapdelaine avec Madeleine Renaud. En 1935, c'est La Bandera où Robert Le Vigan traque un Gabin assassin qui se rachète en mourant sous la tenue d'un soldat de la légion étrangère espagnole. Mais c'est aussi Golgotha et Ponce Pilate (Gabin) qui abandonne à son sort le Christ joué par Le Vigan. Il y aura encore Les bas-fonds de Jean Renoir où Le Vigan joue un poète alcoolique et Quai des brumes de Marcel Carné en peintre maudit. Pendant le tournage de Golgotha en Algérie, il rencontre Antoinette Lassauce, dite Tinou qu'il épouse en janvier 1936.
Le parfait salaud
Robert Le Vigan travaille aussi avec le cinéaste Christian-Jaque. Il accompagne Fernandel pour Un de la légion et Erich von Stroheim et Michel Simon dans Les disparus de Saint-Agil. En 1937, il est le sergent de Sault pour Regain réalisé par Marcel Pagnol. En 1940, alors que plus de la moitié de la France est sous la domination des troupes hitlériennes, selon les conditions de l'armistice signé par le Maréchal Pétain, l'acteur regagne Paris. Il y retrouve Christian-Jaque pour le premier tournage autorisé par les Allemands dans la France occupée, L'assassinat du Père Noël d'après Pierre Véry, avec Harry Baur. Le film sort en 1941, tout comme Romance de Paris avec Charles Trénet et Patrouille blanche avec Sessue Hayakawa. L'acteur tourne une quinzaine de films entre 1940 et 1943 dont Goupi Mains Rouges un drame de Jacques Becker sur un monde paysan sans concession, un pur chef-d'œuvre où il est l'ignoble Goupi-Tonkin.
Avec Céline son âme damnée
Mais Robert Le Vigan ne fait pas que subir avec plus ou moins d'indifférence forcée l'occupation. Très influencé par l'écrivain Louis Ferdinand Céline, il est la caisse de résonance de ce singulier personnage devenu un antisémite et un raciste enragé. L'acteur qui a besoin d'un modèle fort, qui aime narguer, qui s'exalte et devient facilement incontrôlable, est le porte-parole des nazis sur Radio-Paris. Pourtant Céline qui le cite souvent dans ses ouvrages a des propos plutôt méprisant pour Le Vigan. Divorcé d'Antoinette Lassauce, il adhère en 1943 au PPF de Jacques Doriot. En 1944, alors que les troupes alliées ont débarqué en Normandie et qu'il tourne Les enfants du Paradis auprès d'Arletty, Le Vigan s'enfuit vers la Suisse et rejoint les dignitaires de l'État français à Sigmaringen, puis l'Autriche. Rattrapé, il est emprisonné à la prison de Fresnes. Jugé en 1946, il risque la peine de mort. Julien Duvivier, Louis Jouvet, Madeleine Renaud et d'autres sont témoins de la défense qui plaide l'irresponsabilité mentale.
L'infamie et l'exil
Robert Le Vigan est condamné à dix ans de travaux forcés, à l'indignité nationale à vie et à la confiscation de ses biens. Sous liberté conditionnelle en 1948, il tente sans succès de gérer une librairie à Paris. Il s'installe alors en Espagne. En 1950 il est à l'affiche de deux films avec Isabel de Pomés, tournés aux Baléares, El Correo del Rey et La ley del mar. Mais il est encore trop compromettant. Il gagne l'Argentine et tient un petit rôle dans La orquídea puis dans Río turbio. Pourtant amnistié en 1958, Robert Le Vigan s'installe finalement à Tandil, à trois cents kilomètres au sud de Buenos Aires. Pour subsister, il donne des cours, il élève des poules et vend des œufs au marché et se remarie en 1956. Il reçoit quelques aides financières d'amis français. Il décède dans la misère, le 12 octobre 1972, à soixante-douze ans. Ce n'est pas une fin glorieuse. C'est néanmoins la fin d'une longue vie. Certains n'ont pas eu cette chance-là.


FILMOGRAPHIE :

Avec Fernandel
1931 : Les cinq gentlemen maudits de Julien Duvivier
1931 : Radio-folies de Jean Tarride (cm)
1932 : Le chien jaune de Jean Tarride
1932 : Une jeune fille et un million de Max Neufeld & Fred Ellis
1932 : Coquin de sort d'André Pellenc
1932 : En douane d'Antonin Bideau (cm)
1932 : L'éternelle chanson de Robert Vernay (cm)
1933 : Boubouroche d'André Hugon
1933 : Le petit roi de Julien Duvivier
1933 : La rue sans nom de Pierre Chenal
1933 : Le tunnel de Curtis Bernhardt
1933 : Madame Bovary de Jean Renoir
1933 : Knock de René Goupillères & Louis Jouvet
1933 : La femme idéale d'André Berthomieu
1933 : Le prince de six jours de Robert Vernay
1933 : L'homme à la barbiche de Louis Valray (cm)
1933 : Le médecin de service d'André Cerf (cm)
1934 : Maria Chapdelaine de Julien Duvivier
1934 : Famille nombreuse d'André Hugon
1934 : L'affaire Coquelet de Jean Gourguet
1934 : Bien mal acquis d'Earl M. Welch (cm)
1934 : L'article 330 de Marcel Pagnol (cm)
1935 : La Bandera de Julien Duvivier
1935 : Jérôme Perreau, héros des barricades d'Abel Gance
1935 : Golgotha de Julien Duvivier
1935 : La ronde du brigadier Bellot de Raymond Raffin (cm)
1936 : Un de la légion de Christian-Jaque
1936 : Les mutinés de l'Elseneur de Pierre Chenal
1936 : Romarin d'André Hugon
1936 : Les bas-fonds de Jean Renoir
1936 : Jenny de Marcel Carné
1936 : Hélène de Jean Benoît-Lévy & Marie Epstein
1936 : L'homme de nulle part / Feu Mathias Pascal de Pierre Chenal
1937 : L'Occident d'Henri Fescourt
1937 : Franco de port de Dimitri Kirsanoff
1937 : La femme du bout du monde de Jean Epstein
1937 : Regain de Marcel Pagnol
1937 : La citadelle du silence de Marcel L'Herbier
1938 : Quai des brumes de Marcel Carné
1938 : L'avion de minuit de Dimitri Kirsanoff
1938 : Les disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque
1938 : Tempête sur l'Asie de Richard Oswald
1938 : Le petit chose de Maurice Cloche
1938 : Ernest le rebelle de Christian-Jaque
1939 : Le veau gras de Serge de Poligny
1939 : La charrette fantôme de Julien Duvivier
1939 : Le dernier tournant de Pierre Chenal
1939 : Louise d'Abel Gance
1939 : Dédé la musique de Montmartre d'André Berthomieu
1939 : Le monde tremblera / La révolte des vivants de Richard Pottier
1939 : Paradis perdu d'Abel Gance
1940 : Untel père et fils de Julien Duvivier
1941 : L'assassinat du Père Noël de Christian-Jaque
1941 : Romance de Paris de Jean Boyer
1941 : Chambre 13 d'André Hugon
1941 : Patrouille blanche de Christian Chamborant
1941 : Vie privée de Walter Kapps
1942 : Andorra ou les hommes d'Airain d'Emile Couzinet
1942 : La prière aux étoiles de Marcel Pagnol
1942 : Le mariage de Chiffon de Claude Autant-Lara
1942 : La grande marnière de Jean de Marguenat
1943 : Les affaires sont les affaires de Jean Dréville
1943 : Ne le criez pas sur les toits de Jacques Daniel Norman
1943 : Goupi Mains Rouges de Jacques Becker
1943 : Ceux du rivage de Jacques Séverac
1943 : L'homme qui vendit son âme de Jean-Paul Paulin
1943 : La collection Ménard de Bernard-Rolland
1944 : Bifur 3 de Maurice Cam
1944 : Les enfants du paradis de Marcel Carné
1950 : El carreo del rey de Ricardo Gascón
1950 : Ley del mar de Miguel Iglesias
1951 : L'orchidée ( La Orquídea ) d'Ernesto Arancibia
1951 : Las aguas bajan turbias d'Hugo de Carril
1952 : Rio Turbio d'Alejandro Wehner


Filmographie de Robert LE VIGAN
 
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