Gabrielle Fontan naît Gabrielle Pene-Castel le 19 avril 1873 à Bordeaux. Jeune première remarquée, la jeune femme, installée à Paris acquiert une solide expérience théâtrale, monte sa propre troupe et donne des cours dramatiques. Elle a comme élève la jeune roumaine Jany Holt. Elle se produit dans les années vingt des pièces comme Nocturne basque, L’Épreuve du bonheur et intègre la troupe de Charles Dullin avec lequel elle joue La Comédie du Bonheur et Le Fils de Don Quichotte. C’est Charles Dullin qui lui conseille de faire du cinéma dans Maldonne de Jean Grémillon. À cinquante-quatre ans, Gabrielle Fontan se lance dans une nouvelle carrière, devenant une des célèbres Dames aux chapeaux verts auprès de Simone Mareuil et Huguette Duflos.
La servante acerbe
Maigre et sèche, le regard loucheur, elle devient à l’instar de Pauline Carton, Jeanne Fusier-Gir ou Marguerite Moreno, une des servantes du cinéma français. Elle joue les vieilles dames dans Les Misérables de Raymond Bernard, servantes de curé dans Jim la Houlette d’André Berthomieu, la grand-mère dans La Partie de Campagne et dans La Vie est à nous, deux films typiques du front populaire signés Jean Renoir, une concierge dans Le Mort en Fuite avec Michel Simon et Jules Berry et des servantes aux ordres de Françoise Rosay dans Carnet de bal ou de Raimu qui la traite d’alouette sans cervelle dans Les Inconnus dans la maison d’Henri Decoin. Elle est la vieille folle qui croise Jean Gabin dans l’escalier dans Le Jour se lève de Marcel Carné. Même fugitivement, on la retrouve à l’affiche de nombre de classiques comme Entrée des artistes, La Fin du Jour, Macao l’enfer du jeu ou Le Duel de Pierre Fresnay. Elle n’abandonne pas le théâtre, jouant dans Liberté provisoire de Michel Duran, Le Coup de Trafalgar de Roger Vitrac ou L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel mis en scène par Louis Jouvet. Elle dispense gratuitement des cours de théâtre à de jeunes comédiens comme Serge Reggiani ou Jacques Dufilho.
Des vieilles dames haineuses
Après la guerre, ses rôles se limitent à quelques silhouettes, expirant au bout de trente secondes dans Jericho d’Henri Calef, distillant quelques mauvais commérages dans La Maison sous la mer du même Calef, jouant la paysanne sonneuse de cloches dans Monsieur Vincent, les tantines radines dans La Vie chantée de Noël-Noël ou la bonne sourdingue des Grandes Manœuvres de René Clair. Elle fait une courte apparition non créditée à Hollywood dans L’Homme de la Tour Eiffel de Burgess Meredith, son fils dans le film. Même courts, ses apparitions sont marquantes comme la voyante effrayée par ce qu’elle lit dans La main du diable de Maurice Tourneur qu’elle retrouve en vieille femme placée dans une maison de retraite par sa garce de bru, Ginette Leclerc dans Le Val d’Enfer ou l’ancienne nourrice de Jean Gabin à qui elle n’hésite pas à faire la morale dans Voici le temps des Assassins de Julien Duvivier. Gabrielle Fontan a tourné avec les plus grands, de Claude Autant-Lara (Douce, Sylvie et le fantôme), Marcel Carné (Les Portes de la Nuit, Le Pays d’où je viens), André Cayatte (Le dossier noir), René Clair (Porte des lilas), Julien Duvivier (Pot-Bouille). Avec sa voix sifflante, elle se convertit volontiers en femme haineuse comme dans Premier Mai, la vieille cinglée pousse-au-crime dans Quai de Grenelle, la concierge qui dénonce ses locataires dans Deux sous de violette de Jean Anouilh, la religieuse qui harcèle Danièle Delorme dans La jeune Folle, l’usurière assassinée par Raskolonikov (Robert Hossein) dans Crime et Châtiment ou la délatrice anonyme d’En cas de malheur. Concierge aigre et vindicative ou clocharde plus vraie que nature, Gabrielle Fontan aura marqué de son empreinte unique toute la filmographie française jusqu’à la fin des années cinquante où elle tient l’épicerie de Marie Tatin dans Maigret et l’Affaire Saint-Fiacre, son dernier film. Elle s’éteint des suites d’un cancer à l’âge de 86 ans, le 8 septembre 1959 à Juvisy-sur Orge dans l’Essonne après 70 ans de carrière ininterrompue. Mariée à Lucien Teutscher en 1903, elle n’a eu qu’un enfant mort-né en 1898.
FILMOGRAPHIE :
Avec Michèle Alfa, Dany Robin et R. Rouleau
1927 : Le sous-marin de cristal de Marcel Vandal
1928 : Gardiens de phare de Jean Grémillon
1929 : Le Crime de Sylvestre Bonnard d’André Berthomieu
1929 : Ces dames aux chapeaux verts d’André Berthomieu
1930 : Mon ami Victor d’André Berthomieu
1931 : Pour un sou d’amour de Jean Grémillon
1931 : Coquecigrole d’André Berthomieu
1932 : Un beau jour de noces de Maurice Cammage (cm)
1932 : Le petit babouin de Jean Grémillon (cm)
1932 : Dainah la métisse de Jean Grémillon
1932 : Mimi Pandore de Roger Capellani (cm)
1933 : Toto de Jacques Tourneur
1933 : Les misérables de Raymond Bernard
1934 : L’or dans la rue de Curtis Bernhardt
1934 : Un drôle de locataire de René Pujol (cm)
1935 : Pluie d’or de Willy Rozier
1935 : La petite sauvage de Jean de Limur
1935 : Jim la houlette d’André Berthomieu
1936 : Une partie de campagne de Jean Renoir
1936 : La vie est à nous de Jean Renoir
1936 : Vous n’avez rien a déclarer ? Léo Joannon
1936 : Le mort en fuite d’André Berthomieu
1937 : Un carnet de bal de Julien Duvivier
1937 : Le temps des cerises de Jean-Paul Le Chanois
1937 : Ces dames aux chapeaux verts de Maurice Cloche
1937 : Ramuntcho de René Barberis
1937 : Titin des Martigues de René Pujol
1938 : Entrée des artistes de Marc Allégret
1938 : Le petit chose de Maurice Cloche
1938 : La fin du jour de Julien Duvivier
1939 : Le veau gras de Serge de Poligny
1939 : Le Jour se lève de Marcel Carné
1939 : Macao, l’enfer du jeu / L’enfer du jeu de Jean Delannoy
1939 : Entente cordiale de Marcel L’Herbier
1939 : Le duel de Pierre Fresnay
1940 : Les musiciens du ciel de Georges Lacombe
1940 : L’empreinte de dieu de Léonide Moguy
1940 : Premier bal de Christian-Jaque
1940 : Péchés de jeunesse de Maurice Tourneur
1941 : Le moussaillon de Jean Gourguet
1942 : Les inconnus dans la maison d’Henri Decoin
1942 : La fausse maîtresse d’André Cayatte
1942 : Huit hommes dans un château de Richard Pottier
1942 : Picpus / Signé Picpus de Richard Pottier
1942 : Le voyageur de la Toussaint de Louis Daquin
1942 : Madame et le mort de Louis Daquin
1943 : La main du diable de Maurice Tourneur
1943 : Les Roquevillard de Jean Dréville
1943 : À la Belle Frégate d’Albert Valentin
1943 : Mademoiselle Béatrice de Max de Vaucorbeil
1943 : L’escalier sans fin de Georges Lacombe
1943 : Le val d’enfer de Maurice Tourneur
1943 : Douce de Claude Autant-Lara
1943 : Un seul amour de Pierre Blanchar
1943 : Ceux du rivage de Jacques Séverac
1943 : Le voyageur sans bagage de Jean Anouilh
1944 : La collection Ménard de Bernard-Roland
1944 : Le merle blanc de Jacques Houssin
1944 : Service de nuit de Jean Faurez
1944 : Le dernier sou d’André Cayatte
1944 : Lunegarde de Marc Allégret
1944 : Les caves du Majestic de Richard Pottier
1945 : Boule de suif de Christian-Jaque
1945 : Étrange destin de Louis Cuny
1945 : Sylvie et le fantôme de Claude Autant-Lara
1945 : François Villon d’André Zwobada
1945 : Les J3 de Roger Richebé
1945 : Jéricho d’Henri Calef
1945 : Son dernier rôle de Jean Gourguet
1946 : Messieurs Ludovic de Jean-Paul Le Chanois
1946 : La colère des dieux de Carl Lamac
1946 : La maison sous la mer d’Henri Calef
1946 : Pétrus de Marc Allégret
1946 : Les portes de la nuit de Marcel Carné
1946 : Destins de Richard Pottier
1946 : Torrents de Serge de Poligny
1946 : Plume la poule de Walter Kapps
1946 : Le diable au corps de Claude Autant-Lara
1947 : Monsieur Vincent de Maurice Cloche
1947 : Le dessous des cartes d’André Cayatte
1947 : Après l’amour de Maurice Tourneur
1948 : Manon d’Henri-Georges Clouzot
1948 : L’Homme de la Tour Eiffel (The Man on the Eiffel Tower) de Burgess Meredith
1948 : Rapide de nuit de Marcel Blistène
1948 : Le pain des pauvres (Vertigine d’amore) de Luigi Capuano
1948 : Une si jolie petite plage de Yves Allégret
1948 : L’amour (L’amore ) de Roberto Rossellini & Marcello Pagliero
1948 : La bataille de feu de Maurice de Canonge
1948 : Dernier Amour de Jean Stelli
1949 : Julie de Carneilhan de Jacques Manuel
1949 : La Marie du port de Marcel Carné
1950 : La vie chantée de Noël-Noël
1950 : Quai de Grenelle d’Emil Edwin Reinert
1950 : Juliette ou la clé des songes de Marcel Carné
1951 : Deux sous de violettes de Jean Anouilh
1952 : La jeune folle d’Yves Allégret
1953 : Le grand jeu (Il grande Goco) de Robert Siodmak
1953 : Mon frangin de Sénégal de Guy Lacourt
1953 : Les hommes ne pensent qu’à ça d’Yves Robert
1954 : Le dossier noir d’André Cayatte
1954 : Huis-clos de Jacqueline Audry
1954 : La Belle au Bois Dormant de Pierre Badel (tv)
1955 : Papa, maman, ma femme et moi de Jean-Paul Le Chanois
1955 : Les grandes manœuvres de René Clair
1956 : Trapèze (Trapeze) de Carol Reed
1956 : Voici le temps des assassins de Julien Duvivier
1956 : Mon coquin de père de Georges Lacombe
1956 : Le pays, d’où je viens de Marcel Carné
1956 : Les aventures de Till l’Espiègle de Gérard Philipe & Joris Ivens
1956 : Crime et châtiment de George Lampin
1956 : En effeuillant la marguerite de Marc Allégret
1956 : Bonjour toubib de Louis Cuny
1956 : Mon curé chez les pauvres d’Henri Diamant-Berger
1956 : Porte des Lilas de René Clair
1956 : Paris Palace Hôtel d’Henri Verneuil
1957 : L’Amour est un jeu / Ma femme, mon gosse et moi de Marc Allégret
1957 : Pot-Bouille de Julien Duvivier
1957 : Un certain monsieur Jo de René Jolivet
1957 : Les misérables de Jean-Paul Le Chanois
1957 : Premier mai de Luis Saslavsky
1957 : Le cerf-volant du bout du monde de Roger Pigaut
1958 : En légitime défense d’André Berthomieu
1958 : Sois belle et tais-toi de Marc Allégret & Henri Verneuil
1958 : Chéri, fais-moi peur ! de Jacques Pinoteau
1958 : En cas de malheur de Claude Autant-Lara
1958 : Pourquoi viens-tu si tard ? d’Henri Decoin
1958 : Les tricheurs de Marcel Carné
1958 : Les amants de demain de Marcel Blistène
1959 : Monsieur Suzuki de Robert Vernay
1959 : Julie la rousse de Claude Boissol
1959 : Maigret et l’affaire Saint-Fiacre de Jean Delannoy
Filmographie de Gabrielle FONTAN