Une poésie étrange
C'est grâce à la chanson qu'il se fait connaître dans des cabarets de La Rose Rouge ou l'Écluse, écrivant et interprétant des chansons insolites teintées de mystycisme comme Souvenirs d'enfance d'un barbare, La Descente en ville ou Le Clown. Son ami Gilles Schlesser l'a défini en ces termes : « Éclectique, curieux de toute expression créative, Giani Esposito se lance dans la chanson. La chanson, lui répète-ton se doit de respecter des codes, des conventions. On peut qualifier de chanson les textes étranges, décalés, qu'il psalmodie au hasard des auditions ? » On est en 1952 et le jeune homme au physique de beau ténébreux et à la voix chaude n'a que 22 ans.
Le jeune homme ténébreux et tourmenté
Pour le cinéma, il n'interprète que des rôles secondaires de journaliste, de cheminot en grève, de joueur de poker. Sa carrière décolle lorsqu'il incarne le prince Alexandre dans French Cancan de Jean Renoir aux côtés de Jean Gabin et l'ouvrier agricole corse dans Cela s'appelle l'Aurore de Luis Buñuel. Dès lors, Giani Esposito tourne avec parcimonie mais avec des auteurs triés sur le volet. Il est ainsi dirigé par André Cayatte dans Le Dossier noir ou La Vie conjugale, Alexandre Astruc dans Les Mauvaises Rencontres, Pierre Kast dans Le Bel âge, Jacques Rivette dans Paris nous appartient, s'octroyant quelques licences pour des films commerciaux comme Les Hussards d'Alex Joffé, Reproduction interdite de Gilles Grangier, Pardonnez nos offenses de Robert Hossein, Normandie-Niémen de Jean Drévile, Vers l'extase de René Wheeler et La Croix des Vivants d'Ivan Govar. Pour clore cet excellent parcours, il fait une apparition dans le Décaméron de Pier Paolo Pasolini en 1971.
Une figure populaire de la télévision
S'il connaît une carrière sporadique au cinéma, il n'en est pas de même pour le petit écran où il tourne régulièrement passant du Médecin malgré lui et de Gerfaut de François Gir à la Fille dans la montagne de Roger Leenhardt, de Malican père et fils au Cavalier Tempête de Yannick Andréi, de Sainte Jeanne réalié par Claude Loursais (monsieur Cinq dernières minutes) à l'adaptation de la Cerisaie de Tchékhov par Stellio Lorenzi. Il termine La Veuve et L'Enchantement peu avant sa disparition. Son visage ombrageux devient familière pour un fidèle public.
Giani, Pascale et Ersie
En 1959, Giani Esposito fait la connaissance de l'actrice Pascale Petit lors du Festival de Moscou. Ils se marient pendant le tournage d'Une fille pour l'été d'Édouard Molinaro. La future chanteuse Douchka Esposito naît en 1963. Mais la relation entre les deux époux est orageuse. Giani Esposito envisage à plusieurs reprises de concrétiser son divorce avec Pascale Petit, mais faute de temps, il reporte sans cesse les formalités, ce qui attise leur conflit. Le divorce est finalement prononcé le 19 mars 1973. Depuis deux ans, Giani Esposito vit avec une étudiante en histoire de l'art et de la danse, Ersie Pittas, nièce du grand metteur en scène grec Michael Cacoyannis. Il quitte le domicile de Sèvres qu'il partageait avec son épouse Pascale Petit pour s'installer avec Ersie dans un studio de Saint-Germain-des-Prés. Ensemble, ils montent un spectacle musical. Giani dit des poèmes et chante tandis qu'Ersie danse et joue des percussions. En 1972, ils entreprennent une tournée dans toute la France qui totalise 70 représentations. Mais Giani Esposito présente déjà des signes de grande fatigue et refuse de prendre un repos pourtant impérieux. Au bout de deux ans intenses, la tournée doit passer par les Pays-Bas pour se poursuivre en Belgique. Sa mort brutale met fin à ces projets. Atteint d'une hépatite virale et d'une tumeur du cerveau, il meurt le 1er janvier 1974 à Neuilly-sur-Seine. Il n'avait que 43 ans.. Que de projets ne verront de ce fait pas le jour. En 1972, il venait de terminer l'écriture du Bateleur, une pièce de théâtre qu'il avait mis sept ans à écrire en alexandrins. La pièce restera inédite. Au moment de son décès, il continuait à étudier des propositions de téléfilms et de séries. Giani Esposito laisse un souvenir magique d'un artiste complet et singulier tout en rigueur et dépouillement.
FILMOGRAPHIE :
Avec Pascale Petit
1951 : Ma femme est formidable d'André Hunebelle
1951 : Nez de cuir d'Yves Allégret
1952 : Agence matrimoniale de Jean-Paul Le Chanois
1953 : Mon mari est merveilleux d'André Hunebelle
1953 : Cent francs par seconde de Jean Boyer
1953 : La Môme vert-de-gris de Bernard Borderie
1954 : Quai des blondes de Paul Cadéac
1954 : Huis clos de Jacqueline Audry
1954 : Les femmes s'en balancent de Bernard Borderie
1954 : Cadet Rousselle d'André Hunebelle
1955 : French Cancan de Jean Renoir
1955 : Cela s'appelle l'aurore de Luis Buñuel
1955 : Le Dossier noir d'André Cayatte
1955 : Les Mauvaises Rencontres d'Alexandre Astruc
1955 : Les Hussards d'Alex Joffé
1956 : Pardonnez nos offenses de Robert Hossein
1957 : Reproduction interdite de Gilles Grangier
1958 : Les Misérables de Jean-Paul Le Chanois
1960 : Le Bel Âge de Pierre Kast
1960 : Paris nous appartient de Jacques Rivette
1960 : Normandie-Niémen de Jean Dréville et Damir Vyatich-Berezhnykh
1960 : Vers l'extase de René Wheeler
1961 : La Croix des vivants d'Ivan Govar
1961 : On a volé la mer , court métrage de Jean Salvy
1964 : Jean-Marc ou la Vie conjugale d'André Cayatte
1964 : Françoise ou la Vie conjugale d'André Cayatte
1966 : Tonnerre sur l'océan Indien (Il grando colpo di Surcouf) de Sergio Bergonzelli
1971 : Le Décaméron (Il Decameron) de Pier Paolo Pasolini
Télévision :
1957 : L'Équipage au complet de Claude Loursais
1958 : Adélaïde de Philippe Ducrest
1961 : Les Deux Orphelines de Youri
1964 : Le Médecin malgré lui de François Gir
1964 : Une fille dans la montagne de Roger Leenhardt
1966 : Le train bleu s'arrête 13 fois de Yannick Andréi
1966 : Gerfaut de François Gir
1966 : Antony de Jean Kerchbron
1967 : Les Amoureux de Jean-Paul Roux
1967 : Malican père et fils de François Moreuil
1967 : Le Chevalier Tempête de Yannick Andréi
1967 : Marion Delorme de Jean Kerchbron
1968 : Karine de Claude Deflandre
1968 : Le comte Yoster a bien l'honneur (Graf Yoser gibt sich die Ehre) d'Imo Moszkowicz
1968 : La Dame fantôme de François Gir
1969 : Tout pour le mieux de Jeannette Hubert
1969 : Sainte Jeanne de Claude Loursais
1969 : Le Cour cambriolé de Lazare Iglesis
1972 : La Cerisaie de Stellio Lorenzi
1973 : Le Provocateur de Bernard Toublanc-Michel
1973 : La Maîtresse de Jules Renard de François Gir
1974 : La Veuve de François Gir
1974 : L'enchantement de Robert Mazoyer
Filmographie de Giani ESPOSITO