Pierre BRASSEUR
 Acteur et dramaturge français
Pierre Brasseur fait partie de ces monstres sacrés qui ont brûlé la vie par les deux bouts. Ce qui ne l'a pas empêché de faire une carrière éclatante du jeune premier blagueur et un peu molasson aux grandes gueules et cabotins en tout genre pour finir en vieillard insupportable et ingérable.
Pierre Brasseur naît Pierre Albert Espinasse le 22 décembre 1905, à Paris. Il appartient par sa mère, Germaine Brasseur, à une dynastie de comédiens qui a commencé à faire parler d'elle sous la Monarchie de Juillet. Son père Georges Espinasse s'est produit avec la troupe de Sarah Bernhardt. Il débute sur les planches à dix-huit ans, avec comme professeurs Harry Baur et Fernand Ledoux. Il se passionne aussi pour la peinture et fréquente les surréalistes. Après avoir vu Maurice Chevalier jouer au Théâtre des Bouffes Parisiens, le jeune Espinasse décide de devenir acteur.
Gigolo et voyou
Côté cinéma, Pierre Brasseur a un premier rôle, en 1924, dans La Fille de l'eau, un film de Jean Renoir. Il fait son premier parlant en 1930 et tourne pendant la décennie près d'une cinquantaine de films qui vont du comique le plus farfelu au drame, avec notamment Quai des brumes de Marcel Carné face à Jean Gabin, son premier grand rôle de pâle voyou ou Dernière Jeunesse de Jeff Musso aux côtés de Raimu. La plupart de ses prestations sont tombés dans l'oubli mais les quelques films comme Claudine à l'école, Le sexe faible ou Gosses de riche méritent notre attention. Il interprète souvent des seconds rôles de mauvais garçon arrogant mais il est néanmoins l'étudiant en médecine, héros bougon de Mademoiselle ma Mère que réalise Henri Decoin avec Danielle Darrieux et André Alerme. Pierre Brasseur écrit aussi des pièces de théâtre et rédige le scénario de Grisou de Maurice de Canonge, où il a pour partenaire son épouse Odette Joyeux dont il a eu un fils, Claude né en 1936. Parmi ses écrits, on peut retenir L'Ancre noire, Sainte Cécile, Un ange passe et L'Enfant de Poméranie. Il interprète également Alexandre Dumas fils dans La vie passionnée de Verdi de Carmine Gallone et des rôles patriotiques, en 1939, dans Le chemin de l'honneur de Jean-Paul Paulin, et Frères d'Afrique d'Aimée Navarra, film glorifiant les troupes dites indigènes mais resté inachevé du fait de la guerre.
De la veulerie à Frédéric le magnifique
Il change de registre pour incarner des êtres «lâches» comme le jeune homme cynique de Sixième étage. Après l'armistice, Pierre se retrouve en zone libre où il tourne Le soleil a toujours raison avec Tino Rossi et participe à l'opération burlesque et poétique des frères Prévert dans Adieu Léonard. Il travaille aussi avec Yves Allégret dans Les deux Timides, Georges Lacombe pour Le Pays sans étoiles, une des premières apparitions de Gérard Philipe, André Berthomieu pour La croisée des chemins. Jean Grémillon lui donne un rôle marquant de peintre alcoolique dans le chef-d'œuvre Lumière d'été. Puis dans la France entièrement occupée ce sera, aux studios de la Victorine à Nice qu'il rejoint Arletty en Garance et Jean-Louis Barrault en Deburau dans Les enfants du paradis de Marcel Carné où il campe un exceptionnel Frédéric Lemaître, éclatant et tyranique. Brasseur accède au rang de monstre sacré.
Les forts en gueule
Après la guerre, Pierre Brasseur se remarie avec la pianiste italienne Maria Magrini. Tout en privilégiant le théâtre (L'État de siège de Camus, Le Diable et le Bon Dieu de Sartre, Kean d'après Dums, Ornifle d'Anouilh), il travaille encore pour le cinéma. À noter son retour à un personnage assez similaire à celui de Quai des Brumes dans Les Portes de la Nuit qui marque ses retrouvailles avec Carné, sa prestation, puis ses compositions face à Maria Montez et Arletty, dans Portrait d'un assassin de Bernard-Roland, et ses interprétations de Barbe-Bleue, de Raspoutine, du cousin oisif de Jean Gabin dans Les grandes Familles de Denys de La Patellière, du docteur Emery dans La Tête contre les murs de Georges Franju et de l'inquiétant Dr Génessier dans Les yeux sans visage du même Franju, où l'on découvre Claude Brasseur dans un petit rôle. Dans les années soixante, le comédien partage sa vie avec la chanteuse Catherine Sauvage à qui il a donné la réplique dans Deux heures à tuer et continue à interpréter avec panache des rôles même secondaires. Il est notamment le Tonton de La métamorphose des cloportes de Pierre Granier-Deferre avec Lino Ventura et Maurice Biraud, le père de Philippe Noiret dans La vie de Château de Jean-Paul Rappeneau et l'extravagant général Géranium parmi les aliénés du Roi de cour de Philippe de Broca. Il fait un tour en Italie pour La Loi de Jules Dassin et Le Bel Antonio de Mauro Bolognini. Il joue aussi le Fiodor des Frères Karamazov dans l'adaptation télévisée de Marcel Bluwal en 1969 et fait une apparition remarquée dans Les Cinq dernières minutes face à Raymond Souplex. C'est au cours du tournage en Italie (Sud Tyrol) de son 145e film, La plus belle soirée de ma vie d'Ettore Scola avec Alberto Sordi, que Pierre Brasseur décède d'un infarctus le 16 août 1972. C'est un exceptionnel comédien au talent original et à la forte personnalité qui disparaît mais la relève est assurée par son fils Claude Brasseur, puis son petit-fils Alexandre Brasseur et pourquoi pas un jour par ses arrière-petits enfants Louis et Jeanne.


FILMOGRAPHIE :

Avec René Clair
et Danielle Darrieux
1924 : Catherine ou Une vie sans joie d'Albert Dieudonné & Jean Renoir
1925 : La fille de l'eau de Jean Renoir
1925 : Madame Sans-Gène de Léonce Perret
1927 : Feu ! de Jacques de Baroncelli
1930 : Mon ami Victor ! d'André Berthomieu
1931 : Un trou dans le mur de René Barberis
1931 : Circulez ! de Jean de Limur
1931 : Papa sans le savoir de Robert Wyler
1932 : Un rêve blond de Paul Martin & André Daven
1932 : La chanson d'une nuit d'Anatole Litvak & Pierre Colombier
1932 : I.F.1 ne répond plus de Karl Hartl
1932 : Moi et l'impératrice de Friedrich Hollander & Paul Martin
1932 : Quick de Robert Siodmak & André Daven
1932 : Le vainqueur de Hans Hinrich & André Daven
1932 : Voyage de noces d'Erich Schmidt, Joe May & Germain Fried
1933 : Incognito de Kurt Gerron
1933 : Le sexe faible de Robert Siodmak
1934 : L'oncle de Pékin de Jacques Darmont
1934 : Caravane d'Erik Charell
1934 : La garnison amoureuse de Max de Vaucorbeil
1934 : Le miroir aux alouettes d'Hans Steinhoff & Roger Le Bon
1934 : Quadrille d'amour de Richard Eichberg
1935 : Jonny, haute-couture de Serge de Poligny
1935 : Le bébé de l'escadron / Quand la vie était belle de René Sti
1935 : Un oiseau rare de Richard Pottier
1935 : Bout de chou d'Henry Wulschleger
1935 : Jeunesse d'abord de Jean Stelli & Claude Heymann
1935 : Pattes de mouches de Jean Grémillon
1936 : Passé à vendre de René Pujol
1936 : Une femme qui se partage de Maurice Cammage
1936 : Le mari rêvé de Roger Capellani
1936 : Prête-moi ta femme de Maurice Cammage
1936 : La reine des resquilleuses de Marco de Gastyne
1936 : Valse éternelle de Max Neufeld
1937 : Vous n'avez rien a déclarer ? de Léo Joannon
1937 : Le Schpountz de Marcel Pagnol
1937 : Claudine à l'école de Serge de Poligny
1937 : Hercule d'Alexander Esway & Carlo Rim
1937 : Mademoiselle ma mère d'Henri Decoin
1937 : Gosse de riche de Maurice de Canonge
1938 : Café de Paris d'Yves Mirande
1938 : La vie passionnée de Verdi (Giuseppe Verdi) de Carmine Gallone
1938 : Frères Corses de Géo Kelber
1938 : Grisou de Maurice de Canonge
1938 : Le père Lebonnard de Jean de Limur
1938 : Quai des brumes de Marcel Carné
1938 : Visages de femmes de René Guissart
1938 : Trois argentins à Montmartre d'André Hugon
1939 : Dernière jeunesse de Jeff Musso
1939 : Le chemin de l'honneur de Jean-Paul Paulin
1939 : Sixième étage de Maurice Cloche
1940 : Tobie est un ange d'Yves Allégret
1941 : Les deux timides d'Yves Allégret
1941 : Le soleil à toujours raison de Pierre Billon
1942 : Promesse à l'inconnue d'André Berthomieu
1942 : La croisée des chemins d'André Berthomieu
1942 : Lumière d'été de Jean Grémillon
1943 : Adieu Léonard de Pierre Prévert
1944 : Les enfants du paradis de Marcel Carné
1945 : La femme fatale de Jean Boyer
1945 : Jéricho d'Henri Calef
1945 : Le pays sans étoiles de Georges Lacombe
1946 : L'amour autour de la maison de Pierre de Hérain
1946 : L'arche de Noé d'Henri Jacques
1946 : Pétrus de Marc Allégret
1946 : Les portes de la nuit de Marcel Carné
1947 : Rocambole de Jacques de Baroncelli
1947 : La revanche de Baccarat de Jacques de Baroncelli
1947 : Croisière pour l'inconnu de Pierre Montazel
1948 : La nuit blanche de Richard Pottier
1948 : Les amants de Vérone d'André Cayatte
1948 : Le secret de Monte-Cristo d'Albert Valentin
1949 : Millionnaires d'un jour d'André Hunebelle
1949 : Julie de Carneilhan de Jacques Manuel
1949 : Portrait d'un assassin de Bernard-Roland
1950 : L'homme de la Jamaïque de Maurice de Canonge
1950 : Maître après dieu de Louis Daquin
1950 : Souvenirs perdus de Christian-Jaque
1951 : Les mains sales de Fernand Rivers
1951 : Barbe-Bleue de Christian-Jaque
1951 : Le plaisir de Max Ophüls
1952 : Le rideau rouge d'André Barsacq
1952 : La pocharde de Georges Combret
1953 : Raspoutine de Georges Combret
1953 : Vêtir ceux qui sont nus (Vestire gli ignudi) de Marcello Pagliero
1954 : Napoléon de Sacha Guitry
1954 : Oasis d'Yves Allégret
1955 : La tour de Nesle d'Abel Gance
1956 : Porte des Lilas de René Clair
1957 : Sans famille d'André Michel
1958 : Les grandes familles de Denys de La Patellière
1958 : La Loi (La Legge) de Jules Dassin
1958 : Messieurs les ronds de cuir d'Henri Diamant-Berger
1958 : La tête contre les murs de Georges Franju
1958 : La vie à deux de Clément Duhour
1959 : Les yeux sans visage de Georges Franju
1959 : Candide de Norbert Carbonnaux
1959 : Carthage en flammes (Cartagine in fiamme) de Carmine Gallone
1960 : Plein feux sur l'assassin de Georges Franju
1960 : Le bel Antonio (Il bell'Antonio) de Mauro Bolognini
1960 : Le dialogue des carmélites de Philippe Agostini
1960 : Vive Henri IV. Vive l'amour ! de Claude Autant-Lara
1961 : Les amours célèbres de Michel Boisrond
1961 : L'affaire Nina B. (Affäre Nina B.) de Robert Siodmak
1961 : Le bateau d'Emile / Le homard flambé de Denys de la Patellière
1961 : Le crime ne paie pas de Gérard Oury
1961 : Les petits matins / Mademoiselle Stop de Jacqueline Audry
1961 : Rencontres de Philippe Agostini
1962 : Les bonnes causes de Christian-Jaque
1962 : Un soir. par hasard d'Ivan Govar
1962 : L'abominable homme des douanes de Marc Allégret
1963 : Le coq du village (Liolà) d'Alessandro Blasetti
1963 : Humour noir (Umorismo nero), segment « La bestiole » de Claude Autant-Lara & G. Zagni
1963 : Le magot de Josefa de Claude Autant-Lara
1964 : Le grain de sable de Pierre Kast
1964 : Lucky Jo de Michel Deville
1965 : L'or du duc de Jacques Baratier
1965 : Deux heures à tuer d'Yvan Govar
1965 : La métamorphose des cloportes de Pierre Granier-Deferre
1965 : Un monde nouveau (un mondo nuovo) de Vittorio De Sica
1965 : Pas de caviar pour tante Olga de Jean Becker
1965 : Pas de panique de Sergio Gobbi
1965 : La vie de château de Jean-Paul Rappeneau
1966 : Le Roi de Cour de Philippe de Broca
1966 : La petite vertu de Serge Korber
1966 : Un homme de trop de Costa-Gavras
1966 : La fille de la Mer Morte (Fortuna) de Menahem Golan
1967 : Le fou du labo IV de Jacques Besnard
1967 : Les oiseaux vont mourir au Pérou de Romain Gary
1968 : Goto, l'île d'amour de Walerian Borowcszyk
1968 : Sous le signe de Monte-Cristo d'André Hunebelle
1970 : Macédoine de Jacques Scandelari
1970 : Les mariés de l'an II de Jean-Paul Rappeneau
1972 : La plus belle soirée de ma vie (la più bella serata della mia vita) d'Ettore Scola


Filmographie de Pierre BRASSEUR
 
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