Roger Blin est né le 22 mars 1907 à Neuilly-sur-Seine. Fils du médecin Paul Blin et de son épouse Marthe Deguy, il fait des études au collège Sainte-Croix de la ville qui lui offre l’occasion de monter pour la première fois sur scène en jouant un garçon tailleur dans Le Bourgeois gentilhomme de Molière. Il poursuit des études supérieures qui l’amènent à la Sorbonne où il obtient une licence de lettres. Brillant jeune étudiant, il collabore comme critique à La Revue du cinéma.
Membre du groupe Octobre
Roger Blin débute professionnellement au théâtre grâce à Antonin Artaud, qui le fait intégrer dans le Groupe Octobre. Il y fait la connaissance des frères Prévert et de Jean-Louis Barrault. Assistant d’Artaud pour Les Cenci, il y interprète le rôle d’un sourd-muet. Il participe à plusieurs pièces du Groupe Octobre jusqu’à sa dissolution en 1938. Après avoir interprété Calmelet dans Napoléon d’Abel Gance, il coscénarise et coréalise La Rue sans Nom de Pierre Chenal. Il fait ses vrais débuts dans Zouzou de Marc Allégret auprès de Jean Gabin. Il promène son allure frêle et tourmenté dans Un grand Amour de Beethoven d’Abel Gance, Sous les Yeux de l’Occident de Marc Allégret, La Vie est à nous de Jean Renoir, Jenny de Marcel Carné, Les Mutinés de l’Elseneur, L’Alibi et L’Affaire Lafarge de Pierre Chenal. Il joue dans des films populaires comme Le Temps des Cerises de Jean-Paul Le Chanois et se révèle dans le rôle pathétique de l’élève Dominique du Conservatoire dans la classe de Louis Jouvet dans Entrée des Artistes de Marc Allégret.
Des rôles fugitifs mais marquants
Pendant l’Occupation, Roger Blin se produit dans quelques classiques produits par la firme allemande Continentale. On le retrouve ainsi en Vénitien dans Volpone de Maurice Tourneur, en aspirant dans Dernier Atout de Jacques Becker avec Mireille Balin, en montreur de nains dans Les Visiteurs du Soir de Marcel Carné, en Fagotin dans Le Capitaine Fracasse d’Abel Gance, en cancéreux qui se suicide dans Le Corbeau d’Henri-Georges Clouzot, en comédien dans Douce de Claude Autant-Lara, en clerc de notaire dans Le Colonel Chabert de René Le Hénaff et dans l’insouciante bande de La Bohème de Marcel L’Herbier. Il retrouve ses amis du groupe Octobre dans Adieu Léonard de Pierre Prévert.
Une vie dédiée au théâtre
Après la fin de la guerre, Roger Blin retrouve le théâtre et donne la réplique à Maria Casarès et Gérard Philipe dans Les Épiphanies d'Henri Pichette en 1947. Il se lance dans la mise en scène en 1949 et va dès lors consacrer sa vie au théâtre en montant des œuvres difficiles de Genet qu’il fait connaître au public et Samuel Beckett qui lui confie ses principales pièces, En attendant Godot, Fin de Partie, La dernière Bande, Oh ! les beaux jours. Avec son phrasé particulier et son faciès dépressif, Roger Blin n’a pas son pareil pour traduire l’angoisse et la dérision de personnages inoubliables. Il monte des pièces de Denis Johnston (La Lune dans le fleuve jaune), Adamov (La Grande et la petite Manœuvre, La Parodie), Strindbergh (La Sonate des Spectres), Pinter (Le Gardien), Genet (Les Blacks, Les Paravents), Dubillard (Où boivent les vaches), insatiable chercheur en quête d’auteurs.
Un homme de conviction
Pilier de l’avant-garde française et conservant son esprit contestataire très ancré à gauche, il signe en 1960, le Manifeste des 121, qui se prononce pour le « droit à l'insoumission » dans le contexte de la guerre d'Algérie. Il fait quelques apparitions au cinéma souvent auprès de réalisatrices comme Liliane de Kermadec (Aloïse), Yannick Bellon (Jamais plus toujours) ou Jeanne Moreau (L’Adolescente) et des téléfilms de qualité signés Pierre Prévert (Le petit Claus et le grand Claus, Les Compagnons de Baal) , Georges Franju (La Ligne d’ombre) ou Gérard Vergez (Vendredi ou la Vie sauvage). Sa dernière création, Triptyque, de Max Frisch a lieu à l'Odéon, en 1983, avec la troupe de la Comédie-Française. L’acteur s’est toujours tenu à l’écart des modes et du dictat des théâtrologues. Roger Blin est décédé à Paris, le 20 janvier 1984 à l’âge de 77 ans. Un théâtre porte son nom à Coulon dans les Deux-Sèvres.
FILMOGRAPHIE :
Avec Jacques Prévert
1934 : Zouzou de Marc Allégret
1935 : Taxi de minuit d’Albert Valentin (mm)
1936 : Un grand amour de Beethoven d’Abel Gance
1936 : Sous les yeux d’Occident de Marc Allégret
1936 : La Vie est à nous de Jean Renoir
1936 : Les Mutinés de l'Elseneur de Pierre Chenal
1936 : Jenny de Marcel Carné
1937 : La Citadelle du silence de Marcel L'Herbier
1937 : La Dame de pique de Fedor Ozep
1937 : L'Alibi de Pierre Chenal
1938 : La Tragédie impériale de Marcel L'Herbier
1938 : Rendez-vous Champs-Élysées de Jacques Houssin
1938 : Le Temps des cerises de Jean-Paul Le Chanois
1938 : L'Affaire Lafarge de Pierre Chenal
1938 : Adrienne Lecouvreur de Marcel L'Herbier
1938 : Entrée des artistes de Marc Allégret
1939 : Le monde tremblera de Richard Pottier
1939 : L'Esclave blanche de Marc Sorkin
1939 : Louise d’Abel Gance
1940 : Battement de cœur d’Henri Decoin (rôle coupé)
1941 : Volpone de Maurice Tourneur
1942 : L'Âge d’or de Jean de Limur
1942 : Dernier Atout de Jacques Becker
1942 : Les Visiteurs du soir de Marcel Carné
1943 : Le Capitaine Fracasse d’Abel Gance
1943 : Adieu Léonard de Pierre Prévert
1943 : Le Corbeau d’Henri-Georges Clouzot
1943 : Douce de Claude Autant-Lara
1943 : Le Colonel Chabert de René Le Hénaff
1944 : Premier de cordée de Louis Daquin
1945 : La Vie de bohème de Marcel L'Herbier
1945 : Le Jugement dernier de René Chanas
1946 : Le Couple idéal de Bernard Roland et Raymond Rouleau
1947 : Pour une nuit d’amour d’Edmond T. Gréville
1949 : Histoires extraordinaires, « Invitation à la valse » de Jean Faurez
1949 : Hans le marin de François Villiers
1949 : La Dernière Nouvelle de Rune Hagberg et Georges Patrix (cm)
1950 : Orphée de Jean Cocteau
1951 : La Taverne de New Orléans (Adventures of Captain Fabian) de William Marshall
1951 : Le Bagnard de Willy Rozier
1952 : Torticola contre Frankensberg de Paul Paviot
1952 : Piedalu fait des miracles de Jean Loubignac
1954 : Le Chevalier de la nuit de Robert Darène
1955 : À toi de jouer Callaghan de Willy Rozier
1956 : Notre-Dame de Paris de Jean Delannoy
1959 : Les Tripes au soleil de Claude Bernard-Aubert
1961 : Paris Blues (Paris Blues) de Martin Ritt
1964 : Aimez-vous les femmes ? de Jean Léon
1965 : Le Dernier Matin d’Edgar Allan Poe de Jean Barral (cm)
1965 : Le Dernier Matin d’Arthur Rimbaud de Jean Barral (cm)
1965 : Qui a donc rêvé ? de Liliane de Kermadec (cm)
1965 : Les Larmes de crocodiles de Robert Delpire (cm)
1966 : Voilà l'ordre de Jacques Baratier
1966 : Marie Soleil d’Antoine Bourseiller
1966 : Les Ruses du diable de Paul Vecchiali
1967 : La Loi du survivant de José Giovanni
1967 : Le Dimanche de la vie de Jean Herman
1967 : Le Désordre à vingt ans de Jacques Baratier
1970 : Trop petit mon ami d’Eddy Matalon
1971 : Traité du rossignol de Jean Fléchet
1974 : Dada au cœur de Claude Accursi
1975 : L'important c'est d’aimer d’Andrzej Zulawski
1975 : Aloïse de Liliane de Kermadec
1975 : Lily aime-moi de Maurice Dugowson
1975 : Il faut vivre dangereusement de Claude Makovski
1976 : Jamais plus toujours de Yannick Bellon
1977 : Solveig et le violon turc de Jean-Jacques Grand-Jouan
1977 : Le Vieux Pays où Rimbaud est mort de Jean Pierre Lefebvre
1978 : Couleur Chair de François Weyergans
1979 : L'Adolescente de Jeanne Moreau
Télévision :
1960 : Les Trois Sœurs de Jean Prat
1962 : Le Navire étoile d’Alain Boudet
1962 : Quatre-vingt-treize d’Alain Boudet
1964 : Le Petit Claus et le Grand Claus de Pierre Prévert
1968 : Les Compagnons de Baal de Pierre Prévert
1968 : Bouclage d’Alain Boudet
1971 : Mesure pour mesure de Marcel Bluwal
1973 : La Ligne d’ombre de Georges Franju
1975 : La Croisée de Raoul Sangla
1975 : Que voyez-vous Miss Ellis ? de Claude Mourthé
1979 : Les Petits Soirs de Raoul Sangla
1981 : Vendredi ou la Vie sauvage de Gérard Vergez
1982 : La Neige et la cendre de Jacques Espagne
1983 : L'Hôpital de Leningrad de Sarah Maldoror
Filmographie de Roger BLIN