Harry BAUR
 Acteur français
Henri Marie Rodolphe Baur est né à Paris, le 12 avril 1880. Ses parents, catholiques alsaciens, ont choisi de quitter leur région d'origine après la débâcle de 1870. Installé comme horloger-bijoutier, M. Baur se retrouve ruiné à la suite d'un cambriolage. Aussi l'enfance d'Henri sera difficile, d'autant que son père meurt alors qu'il n'a que dix ans. Sa mère, qui ne l'aime guère, le place dans une institution religieuse avec l'espoir de le voir devenir prêtre. De tempérament ombrageux, il ne se plie pas à la règle du collège et fugue à treize ans vers Marseille où il vit d'expédients pendant plusieurs mois jusqu'à ce que sa mère l'inscrive d'office au collège à Saint-Nazaire. Attiré par la marine marchande, il s'inscrit à l'École d'Hydrographie de Marseille dont il est chassé pour indiscipline au bout d'un an. C'est le théâtre qu'il choisit avec le désir d'égaler un jour son modèle, Lucien Guitry. Recalé par deux fois pour l'entrée du Conservatoire d'Art Dramatique de Paris, il a plus de chance avec celui de Marseille.
Sur les planches
Harry Baur multiplie les prestations fugitives dans des spectacles indignes parfois de son talent et doit se résoudre à être colporteur, charretier ou dessinateur ambulant. Il devient le secrétaire du fameux comédien Mounet-Sully. Jusqu'aux débuts du parlant, c'est le théâtre qui aura les faveurs du comédien. Il participe de façon inattendue à une revue menée par Mistinguett et Maurice Chevalier et tourne ses premiers films muets. C'est bien le cinéma des années 30 qui va rendre populaire un comédien de plus de cinquante ans au physique imposant et à l'autorité manifeste. David Golder marque les débuts d'une belle association avec Julien Duvivier, même si ces deux tempéraments explosifs s'affrontent à l'occasion. Il donne toute son humanité au touchant Monsieur Lepic dans Poil de Carotte et devient un mémorable commissaire Maigret dans La tête d'un homme. Pendant le tournage des Cinq Gentlemen maudits, Rose Grane, l'épouse du comédien depuis vingt ans, tombe malade sur le tournage. Hospitalisée en Algérie, elle meurt brutalement. Au premier rang des beaux souvenirs que nous lègue la filmographie de Harry Baur s'impose bien sûr Les Misérables de Raymond Bernard, la meilleure adaptation du roman-fleuve de Victor Hugo. Il est un juge Porphyre, bonhomme et faussement naïf dans Crime et châtiment, le bouleversant compositeur dans Un grand amour de Beethoven et le pittoresque Samson de Maurice Tourneur avec Gaby Morlay.
Acteur caméléon
Star incontournable de l'écran, Harry Baur ne dédaigne pas cependant les participations comme le rôle de Monsieur de Tréville dans Les trois mousquetaires, celui d'Hérode dans Golgotha ou le moine dominicain d'Un carnet de bal. En revanche certains films au contexte colonialiste ont mal vieilli comme Les hommes nouveaux, L'homme du Niger ou Sarati le terrible ou les personnages inspirés de Gogol ou Pouchkine comme Les Nuits moscovites, Les Yeux noirs, Nitchevo ou Tarass Boulba sans oublier le funeste Raspoutine dans La tragédie impériale de Marcel Lherbier. Face au tonitruant comédien, des partenaires émérites comme Pierre Renoir ou Suzy Prim savent qu'ils devront baisser pavillon, à l'exception peut-être de Gabrielle Dorziat, l'épouse tyranique de Mollenard ou l'aréopage prestigieux convoqué pour Volpone où Harry Baur paraît en majesté auprès de Jouvet, Charles Dullin et Fernand Ledoux. Parvenu au sommet de sa carrière, Harry Baur ne profita guère de son aura glorieuse que la guerre allait anéantir. Remarié depuis peu à Rika Radifé, sa secrétaire et partenaire dans Sarati le terrible, une infâme campagne de presse dénonce Harry Baur comme juif et franc-maçon. Le comédien se défend en produisant un certificat d'aryanité et accepte de tourner deux films pour la société allemande Continental. Si Péchés de jeunesse n'est pas le meilleur film de Maurice Tourneur, L'assassinat du Père Noël est une réussite éclatante de Christian-Jaque et le dernier grand rôle du comédien en Père Cornusse attendrissant et sympathique ivrogne. Le film connaîtra un beau succès mais sa vedette n'en recueillera pas les lauriers car, au moment de la sortie, il tourne à Berlin pour la Tobis ce qui restera son dernier film, Symphonie d'une vie.
Tragédie de la bêtise
Accusé par Radio-Londres de compromission avec l'occupant, il n'en est pas moins soupçonné par la Gestapo d'avoir menti sur son origine. À peine rentrés à Paris, Harry Baur et Rika Radifé sont dénoncés comme juifs et arrêtés le 30 mai 1942. Alors que son épouse est transférée à la prison de la Santé, le comédien est incarcéré au Cherche-Midi. Privé de soins et de visites, il subit pendant plus de trois mois des interrogatoires éprouvants, véritables séances de torture. Finalement libéré le 19 septembre, amaigri de plus de trente kilos, il ne se remettra pas de son incarcération et mourra six mois plus tard, quasi paralysé, à son domicile parisien, le 8 avril 1943. Il y a bien longtemps maintenant que le yacht d'Harry Baur n'est plus amarré à Noirmoutier où il aimait passer ses vacances. Pourtant, au cimetière Saint-Vincent de Montmartre, sa tombe reçoit toujours la visite de spectateurs reconnaissants pour cet impérial premier grand comédien de l'ère moderne.


FILMOGRAPHIE :

Avec Jean-Pierre Aumont et Denise Cremer
1908 : Beethoven de Victorin Jasset
1908 : Le Bon Cambrioleur (anonyme)
1909 : Arsène Lupin de Michel Carré
1909 : L'Assommoir d'Albert Capellani
1909 : Don César de Bazan de Victorin Jasset
1909 : Hector est un garçon sérieux (anonyme)
1909 : La Jeunesse de Vidocq ou Comment on devient policier (anonyme)
1909 : La Légende du bon chevalier de Victorin Jasset
1909 : La Miniature de Michel Carré
1909 : Les petits iront à la mer (anonyme)
1909 : L'enlèvement de Mademoiselle Biffin (anonymes)
1909 : Les Noces de Canuche de Michel Carré
1909 : Octave (anonyme)
1909 : Les Suicidés de Louf de Michel Carré
1910 : Les Aventuriers du Val-d'Or (anonyme)
1910 : L'Évasion d'un truand de Michel Carré
1910 : Le Four à chaux de Michel Carré
1910 : Sur la pente de Michel Carré
1910 : La Haine d'Albert Capellani
1910 : La Note de la blanchisseuse Frisette, blanchisseuse de fin de Georges Denola
1910 : Le Mauvais pilote (anonyme)
1910 : Les Messagers de Notre-Dame de Léon Boulnois
1910 : L'Évasion de Vidocq de Georges Denola
1910 : Shylock, le marchand de Venise d'Henri Desfontaines
1911 : Vidocq de Gérard Bourgeois
1912 : Les Amis de la mort (anonyme)
1912 : Le Cheveu d'or de Pierre Bressol
1912 : Le Secret du lac (anonyme)
1913 : Monsieur Lecoq de Maurice Tourneur
1913 : Le Naufragé de Michel Carré
1913 : Le Roman de Carpentier (anonyme)
1915 : Chignon d'or d'André Hugon
1915 : Strass et Compagnie d'Abel Gance
1916 : Quand l'amour meurt de Raoul d'Auchy
1916 : Le Suicide de Sir Letson de Jacques de Baroncelli
1917 : 48, avenue de l'Opéra de Georges Denola
1917 : L'Âme du bronze d'Henry Roussell
1917 : Sous la griffe d'Albert Dieudonné
1918 : L'Angoisse dans la nuit (anonyme)
1924 : La Voyante de Leon Abrams
1930 : David Golder de Julien Duvivier
1931 : Le Cap perdu d'Ewald Andre Dupont
1931 : Les Cinq gentlemen maudits de Julien Duvivier
1931 : Le Juif polonais de Jean Kemm
1932 : Criminel de Jack Forrester
1932 : Poil de carotte de Julien Duvivier
1932 : Rothschild de Marco de Gastyne
1932 : La Tête d'un homme de Julien Duvivier
1932 : Les Trois Mousquetaires, d'Henri Diamant-Berger
1933 : Cette vieille canaille d'Anatole Litvak
1934 : Les Misérables de Raymond Bernard
1934 : Le Greluchon délicat de Jean Choux
1934 : Les Nuits moscovites d'Alexis Granowsky
1934 : Un homme en or de Jean Dréville
1935 : Golgotha de Julien Duvivier
1935 : Crime et châtiment de Pierre Chenal
1935 : Le Golem de Julien Duvivier avec
1935 : Moscow Nights d'Anthony Asquith
1935 : Samson de Maurice Tourneur
1935 : Les Yeux noirs de Victor Tourjansky
1936 : Tarass Boulba d'Alexis Granowsky
1936 : Les Hommes nouveaux de Marcel L'Herbier
1936 : Nitchevo de Jacques de Baroncelli
1936 : Paris de Jean Choux
1936 : Un grand amour de Beethoven d'Abel Gance
1937 : Mollenard de Robert Siodmak
1937 : Nostalgie de Victor Tourjansky
1937 : Sarati le terrible de André Hugon
1937 : Les Secrets de la mer Rouge de Richard Pottier
1937 : Un carnet de bal de Julien Duvivier
1938 : La Tragédie impériale de Marcel L'Herbier
1938 : Le Patriote de Maurice Tourneur
1939 : L'Homme du Niger de Jacques de Baroncelli
1940 : Le Président Haudecour de Jean Dréville
1940 : Volpone de Maurice Tourneur
1941 : L'Assassinat du Père Noël de Christian-Jaque
1941 : Péchés de jeunesse de Maurice Tourneur
1942 : Symphonie d'une vie (Symphonie eines Lebens) de Hans Bertram

Filmographie de Harry BAUR
 
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